La technologie permet aujourd’hui de recréer l’esprit des stands et donc des échanges commerciaux en mode B2B
Le secteur de l’événementiel professionnel est en grande souffrance. Des centaines de rendez-vous d’envergures locale, nationale ou internationale, pâtissent d’une suspension de leur activité pour une durée indéterminée. Cependant, les organisateurs trouvent des ressources pour perdurer, dont le levier principal est sans surprise internet. Quelles sont les limites de ces rendez-vous dématérialisés ?
SIAL, EQUIPHOTEL, Sandwich and Snack Show, Sirha… autant de rendez-vous charnières pour la profession du Foodservice qui ont dû être annulés ou bien reportés dans le « meilleur » des cas. Si les plus grands acteurs des salons professionnels français sont inquiets pour la suite, de plus petites structures d’organisation ont bien rapidement mis la clé sous la porte, victimes quasi immédiates de l’incertitude généralisée. D’après la CCI, 209 salons avaient été déjà annulés en Ile de France en septembre 2020, coupant ainsi le territoire de l’équivalent de 12,9 milliards d’Euros de chiffre d’affaires. Les pertes directes et indirectes liées à la suspension ou l’annulation d’un salon sont colossales. En outre, cette situation pénalise non seulement l’économie stricto sensu mais cela empêche aussi la profession de se retrouver pour dessiner son avenir. Si l’on a vu plusieurs modèles de conventions dématérialisées se développer, aucun ne semble pourtant à la hauteur économique et humaine d’un événement physique.
Recréer des lieux de rendez-vous
La problématique qui a agité les organisateurs du monde entier revient à préserver le postulat de ce type d’événements : créer l’échange entre professionnels. La formule la plus utilisée ressemble à une plate-forme de type « réseau social » où les utilisateurs peuvent se retrouver en One-to-One, assister à une conférence en ligne, suivre la visite d’un showroom virtuel animée ou non par un avatar. La vraie notion disruptive concerne la pérennisation de ces rendez-vous dématérialisés. Au lieu de juguler un événement à quelques jours, il a désormais lieu toute l’année, en ligne, animé par des contenus multimédias qualifiés et des outils B2B adaptés. C’est par exemple le choix fait par les organisateurs du Sirha, GL Events, qui mute et devient un écosystème baptisé Sirha Food, dont le postulat est d’ « ouvrir la voie au futur de l’événementiel ». « C’est la 20e édition, mais plutôt que de le fêter en fanfare, nous avons préféré nous concentrer sur la réflexion, la concrétisation de notre volonté d’aller plus loin et de jouer encore plus notre rôle prospectif », explique Luc Dubanchet, directeur des marques, dans un communiqué de presse. « C’est pourquoi nous regroupons sous une même marque ombrelle – Sirha Food – l’ensemble de nos marques Food pour réunir notre audience, soit plusieurs centaines de milliers de professionnels, et leur permettre d’échanger et de s’informer tout au long de l’année, notamment à travers le portail sirhafood.com, qui sera un media global d’information du Food Service ». Toutes ces initiatives dématérialisées ont pour point commun de reposer sur une stratégie de communication ultra régulière sur les réseaux. Le tour de force consiste à mettre au courant les exposants, visiteurs et autres prospects que l’aventure d’un salon continue en ligne, tout en leur garantissant un contenu à forte valeur ajoutée, dans le fond comme dans la forme. Face à la généralisation des services dématérialisés dans le secteur des salons et autres congrès, les organisateurs rivalisent d’imagination pour tirer leur épingle du jeu. Cependant, si certains événements tels que le salon Maison&Objet avec sa plate-forme MOM ont rencontré un succès certain, peu de témoignages offrent un retour très satisfaisant.
Des modèles complémentaires ?
Béatrice Gravier, Directrice des salons SSS et Equiphotel (Reed Expositions), croit en la complémentarité de la solution digitale et du présentiel. Les deux événements SSS et EquipHotel sont remaniés en version dématérialisée, selon deux axes : « D’abord, il s’agit d’apporter du contenu : nous mettons à disposition de nos clients et des visiteurs inscrits des conférences et des prises de parole d’experts tout au long de l’année. En effet, nous pensons qu’il y a un réel besoin d’échanges, de dialogue et de partage auquel un programme de conférences online peut répondre ». La deuxième pierre à l’édifice digital de Reed Expositions se traduit par la diffusion d’un vaste répertoire multisectoriel de produits. « Nous avons sondé nos exposants afin d’identifier leur besoin dans ce contexte de crise. Sans surprise, nos interlocuteurs cherchent une solution afin de présenter leurs produits aux professionnels de l’hôtellerie-restauration. Nous préparons ainsi notre nouvelle plate-forme eh! Online, sorte de véritable catalogue virtuel de sourcing produits et fournisseurs catalogue virtuel et plate-forme et outil de mise en relation entre les donneurs d’ordre de l’industrie et leurs fournisseurs ». Disponible dès avril 2021, la plate-forme eh! Online met donc en avant des sociétés de fournisseurs, donne accès à un bouquet d’innovations produits et solutions, et fait entrer les fournisseurs et les restaurateurs en relation directe. Cependant ces initiatives « d’urgence » ne sauraient remplacer les éditions physiques de façon pérenne, a fortiori dans le Foodservice. En effet, comment vendre un café, une boisson, un snack, sans dégustation ? Autre exemple : au sein d’EquipHotel, des exposants viennent par exemple présenter leurs parfums d’ambiance ou encore des installations lumineuses innovantes pour les chambres d’hôtels : comment convaincre un acheteur sans qu’il puisse toucher, goûter, voir ? Il existe en outre un paramètre que les algorithmes gérant les suggestions sur les plates-formes de mise en relation des professionnels ne peuvent produire : le hasard de la rencontre. C’est bien en se perdant dans les allées d’un salon que la veille, la découverte et les bonnes surprises peuvent se faire… et déboucher parfois sur un accord commercial. Le silence des pouvoirs publics met à mal le secteur de façon massive et inédite. « En tant qu’organisateur de salons, notre ambition et notre volonté sont de continuer à favoriser la rencontre, les opportunités de découvertes et d’affaires, à diffuser l’innovation, et à créer et nourrir des débats et contenus autour des sujets qui animent nos communautés. Gérer les flux de personnes est notre métier, en temps de COVID comme en temps normal et la santé et sécurité de tous reste notre priorité. Nous saurons accueillir nos participants dans le respect des règles sanitaires », rappelle la Directrice de SSS et d’Equiphotel. Certes, c’est bien là la qualité principale des organisateurs : l’adaptabilité et la réactivité.