Leva Class de La San Marco peut être configurée pour que des baristas travaillent de chaque côté de la machine, face à face.
Les machines à café sur lesquelles les baristas pratiquent lors des championnats sont sélectionnées selon des critères exigeants, garantissant les meilleures conditions de travail au compétiteur. Quels sont ces critères et évoluent-ils avec leur temps ?
L’écosystème des machines de compétition reste une dimension (très) peu connue. Si les baristas sont aujourd’hui érigés au rang de stars, et sont même sollicités pour devenir « ambassadeur » de grandes marques de café, d’autres stars, plus discrètes, s’affichent dans les concours : il s’agit des machines. En effet, le choix de l’équipement sur lequel travaillent les candidats est primordial, d’autant plus que le fabricant et l’organisation passent un contrat de trois ans. Enquête sur les coulisses des concours de barista.
Des critères exigeants
Le principal atout d’une machine de compétition réside dans la stabilité de son processus d’extraction : « La température et la pression sont fixées par l’organisation. Nous réalisons plusieurs tests pour arriver à une extraction la plus précise et constante possibles », raconte Nicolas Poirot-Crouvezier, gérant de Nuova Distribution. Si autrefois ces critères étaient gravés dans le marbre, nos interlocuteurs attestent du fait que le temps a oeuvré en faveur d’une certaine souplesse. « A l’époque par exemple, la température et la pression étaient préréglées, il n’était absolument pas permis d’y toucher. Aujourd’hui, en fonction de la spécialité qu’il doit réaliser, le barista a une marge de manoeuvre qui oscille entre 90.5 et 96 degrés, puis entre 8.5 et 9.5 bars. Il doit en revanche donner ses réglages à l’organisation en amont du concours », explique Luca Casadei, barista et ambassadeur de Segafredo Zanetti en France. Cet expert a eu l’occasion d’être candidat, a remporté deux fois le championnat de France barista et a participé une fois à la World Barista Championship : « Les outils sont de plus en plus performants techniquement et technologiquement avancés avec le temps. Par exemple, auparavant, nous avions moins d’outils de travail de précision, c’est-à-dire que nous n’avions pas à disposition les moulins ou les balances ». La technologie évoluant, le règlement des concours s’est ouvert à des machines plus sophistiquées et plus précises. Ces innovations participent à l’ergonomie de l’équipement, et donc dans une certaine mesure soulagent le barista de certains paramètres techniques qui lui apportent plus de confort et lui laissent la place de se concentrer sur la réalisation de sa boisson d’une part, mais également sur la partie communication de l’épreuve. En effet, le barista doit expliquer à voix haute chaque étape qu’il opère derrière la machine.
Un test en forme de concours
« Finalement, nous pourrions faire une analogie avec l’univers de la Formule 1 : la compétition sert de test à des procédés et des technologies qui doivent convenir à un usage de tous les jours », s’amuse Luca Casadei. En effet, les machines de concours sont aussi les modèles qui équipent les coffee shops haut de gamme, voire très haut de gamme. Nicolas Poirot-Crouvezier ajoute ici que « la Black Eagle de Victoria Arduino a été réalisée par des baristas pour des baristas. Leur expertise nous a notamment amenés à améliorer le système de tirage de vapeur. Simple et optimal, il apporte une véritable assistance au professionnel ». C’est pourquoi, en amont du jour J, les machines sont mises à l’épreuve d’une batterie de tests par le fabricant lui-même, mais elles passent également entre les mains du barista candidat. Les modèles sponsors des championnats, mondiaux ou nationaux, sont en effet mis à disposition des compétiteurs afin qu’ils s’entraînent et appréhendent leur ergonomie. Les fabricants de machines se dépassent donc aussi bien en termes de savoir-faire technique qu’en termes de design. A la demande du WBC, les fabricants sponsors sont en effet invités à développer des éditions exclusives en fonction de la ville où se déroule l’événement. Ces objets collector sont ensuite remis sur le marché.
Le critère écolo
Est-il requis par la charte émise par les organisations ? « L’aspect ’clean’ se pose et anime les discussions actuelles de la SCA mais à ce jour, il n’y a encore aucune obligation d’observer ce critère », répond Nicolas Poirot-Crouvezier. « Nous sommes déjà prêts si cela devient le cas. La prise en considération de la dimension écologique ne date pas d’hier chez Victoria Arduino, elle fait même partie de l’ADN de la marque ». En guise d’illustration, Eagle One a 23 % d’impact sur l’environnement en moins que les modèles du même standard. « L’option ‘stand by’ existe depuis un certain temps, c’est en quelque sorte la première technologie d’économie d’énergie que l’on pouvait trouver sur une machine à café, relève Luca Casadei. On fait de plus en plus de systèmes de chauffe par induction, ce qui réduit considérablement la consommation d’électricité. Les matériaux utilisés peuvent aussi faire la différence. Cependant, une autre alternative ‘clean’ existe : il s’agit des machines à levier. ». La spectaculaire Leva Class de la maison italienne historique La San Marco fonctionne sur cette base. Le procédé qui contrôle le retour du levier, potentiellement dangereux, est lentement amorti pour un confort optimal du barista. Les « bêtes de concours » que représentent cette famille de machines à café traditionnelles très haut de gamme synthétisent le meilleur de la tradition et de la technologie. Certaines innovations ont permis aux baristas de pousser encore plus loin leurs limites, ou encore elles les soulagent d’opérations au profit d’un autre pan primordial de leur métier : accueillir leur clientèle.